Dans le cadre du programme de conférences, organisé par le salon Maison&Objet janvier 2020, l’intitulé « Dark Symbiosis » nous a interpellés. Patricia Beausoleil, directrice de création chez Peclers Paris, introduit ici une tendance qui pourrait bien succéder au raz de marée écolo qui sévit, en ce printemps été 2020. Voici ce que nous avons retenu de cette étrange anticipation du futur.
Par Florence Julienne
Après avoir baigné dans une humeur de mode qui nous a plongés dans le tout digital (les e shops, les réseaux sociaux, l’intelligence artificielle, les avatars), nous autres terriens avons fait un rejet de greffe. Sensibles au discours alarmant des climatologues, nous nous sommes tournés vers Dame Nature constatant les dégâts de la déforestation, l’industrialisation, la pollution. En une saison (le printemps été 2020), tout le monde est devenu plus vert que vert. Aujourd’hui, plus aucune entreprise de mode ne sort sans son passeport dûment tamponné RSE (responsabilité sociale et environnementale). De fait, on voit fleurir un style néoseventies qui, il faut bien l’admettre, est à l’extrême opposé du monde qu’on nous promettait il y a peu. La mode a l’art de changer de casquette…
Selon Peclers, l’avenir est à la réunion des genres ! Dark Symbiosis signifie la rencontre entre un monde digitalisé et ce besoin d’être connectés à la source de la matière. Autrement dit, pour Dark Symbiosis, la technologie se met au diapason de l’essentiel. D’un point de vue mode, cela se traduit par la réconciliation entre les matières élémentaires, brutes, l’archaïsme minéral et la cyber esthétique.
« Dans nos sociétés post-industrielles, les matériaux tangibles et élémentaires sont de retour au centre des réflexions et considérations esthétiques. Filtrée à travers les technologies numériques et les processus innovants ou ré-ancrée sur sa force tellurique, une nouvelle matérialité apparaît, offrant une réponse universelle, conciliant nos aspirations avec la notion de progrès », Patricia Beausoleil.
Inspirations & Design
Approche rudimentaire. Volonté de se carapacer. Purification. Fascination pour le virtuel, pour l’étrange. Esthétique des années 80. Savoir-faire industriel. Architecture brutaliste. Connections sensorielles. Mobilité visionnaire. Formes 3D fluides et ergonomiques. « Place à un design pragmatique et sensible, ouvrant un pont entre un avenir technologique sans limites et un besoin de se ré-ancrer dans le monde réel. Une création qui brouille les frontières entre virtualité et matérialité, futurisme et archaïsme ».
Matières
Cohabitation du métal et du minéral. Métal brut, aérien ou laminé, dentelles métalliques graphiques, cottes de mailles, parures néoprimitives, jeux de tressages, torsades ou assemblages de chaînes, tout en relief, résine, céramique, marqueterie de nacre. « L’attrait de l’irréel porté par le monde numérique ouvre les perspectives d’une nouvelle esthétique faite de distorsions fluides, d’éclats métalliques, de typographies évanescentes, de motifs thermo-réactifs et holographiques… Des structures et des textures étranges et fascinantes qui semblent être en mouvement et en constante évolution (finitions dichroïques*) ».
Couleurs & Effets
Différentes nuances de noirs, outre noir, béton, ébène, plomb, faux noirs avec effets violets, bleu électrique. Brillances liquides, luisances sombres, reflets huilés, nylon laqué, cuir craquelé, vernis, oxydation colorée des métaux, finition poudrée. « Nous explorons le côté sombre et étrange de la matière, exprimé sur des surfaces laquées, froissées, fissurées ou ultra-glossy et iridescentes dans une expression radicale libérée de la couleur ».
*Dichroïques : propriété de certaines substances qui offrent des colorations diverses, selon les circonstances d’observation.